Colosse au pied d'argile (24/05/2016)

pénurie, essence, propagande, black out, greveNous avons tous en tête ces images de films ou séries catastrophes : en quelques jours, le vernis de civilisation craquelle, saute, puis l’humanité finit par tomber dans ses pires travers, en un temps réduit. Un virus, un black-out, une guerre, en quelques heures, en quelques jours, nos sociétés de la tablette numérique se disloquent pour faire un bond en arrière de plusieurs siècles.

Quelques pompes à sec et c’est une myriade d’enseignements que nous pouvons tirer de nos sociétés modernes, entre espérance et terreur, amusement et sémantique outrancière.

Ainsi, face à un risque de pénurie, le comportement individualiste réalise cette pénurie. Les prophéties autoréalisatrices, Homo Sapiens en est le spécialiste. Chacun veut remplir son réservoir, accélérant la pénurie dans un défilé de voitures à l’arrêt où rapidement bienséance et politesse cèdent le pas devant l’écume de la rage de ne pas être servi. Les cuves se vident, les caméras se délectent des panneaux pompes à sec et les petites cartes punaisées des stations fermées viennent renforcer un peu plus l’envie pressante de faire le plein, ce qui accélère la pénurie… Nous sommes les propres victimes de nos comportements grégaires.

Deuxième enseignement, la fronde de David face à Goliath, c’est la solidarité et le blocage. Éparpillés, nous ne pesons rien, ensemble, nous pouvons beaucoup, en s’attaquant aux quelques points névralgiques. C’est autant par des soucis de fluidité de l’économie que pour des raisons politiques que le gouvernement se veut ferme : il ne faudrait pas que les uns et les autres découvrent qu’il n’est pas si difficile de reprendre son destin en main et faire plier les élites et les possédants.

Troisième enseignement, la bataille des symboles et des mots. Le traitement médiatique, les expressions employées. C’est un combat pour désavouer un mouvement et une pratique, en lien avec le paragraphe précédent. Quand les forts ont l’argent, le 49-3 et le pouvoir pour imposer la volonté, il ne reste que le rapport de force aux autres. Et quand ce rapport de force s’instaure, il convient de sortir les gros mots pour éviter que l’opinion ne se prenne à se ranger derrière David : otage, minorité, syndicalistes rouge qui tache, en présentant des automobilistes qui semblent vivre la fin du monde dans la pire zone de guerre. La caricature n’est pas loin…

Dernier enseignement (mais il y en a plein d’autres). Nous sommes des colosses au pied d’argile. Nos sociétés complexes sont si dépendantes du pétrole, du transport et des échanges mondiaux qu’une rupture de la chaîne terrasserait la société et la balaierait comme un fétu de paille en quelques jours. La société se réorganise après un cataclysme, les conflits en cours le prouvent, en Ukraine, en Syrie, mais le prix à payer est immense. Construire un monde féodal, certains en rêvent, à condition d’en être les seigneurs, et donc d’en maitriser le processus : la déréglementation oui, la déflagration qui les emporterait, non…

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