Gastronomie et résistance (16/04/2021)

Et donc aujourd’hui, vous nous parlez de gastronomie et de résistance ? 

Oui enfin résistants, seulement ceux que l’on mérite ! Et c’est pas jojo! Notre prohibition a un gout rance et nos résistants culinaires une consistance de carottes vichy depuis longtemps passées ! Avec la découverte des restaurants clandestins, et les réactions qu’elle déclenche, nous n’avons pas fini de rire et de pleurer… 

Pour se mettre dans l’ambiance, rejouons les mêmes scènes à des décennies d’écart : 

D'abord façon prohibition 

1926 : Personne ne vous a suivi, non, c’est bon goutez moi ce bourbon distillé dans une cave clandestine c’est 100 dollars le verre et surtout n’en parlez à personne... 

2021 : Personne ne vous a suivi, non, très bien goutez moi ces spaghettis servis sans masque à 400 €, oui bien entendu, vous pouvez poster la photo du plat sur instagram... 

Et ensuite à la manière résistance 

1942 : personne ne vous a suivi, non, c’est bon, ok on peut commencer la réunion ! vive la résistance et bien entendu cette réunion n’a jamais eu lieu ! 

2021 : personne ne vous a suivi, non, c’est bon, ok on peut commencer le repas avec le plat de résistance, oui bien sur le selfie avec le chef sur facebook est inclus dans la note… 

Vous voyez, les pseudo-résistants de 2021 ont quelque chose de pathétique... et de profondément stupide par le côté fanfaron qu’ils affichent, par exemple en commentant le repas clandestin sur leurs fils d’actualités... et immédiatement une question nous brule les lèvres, doit-on les mettre à l’amende pour avoir enfreint l'interdiction ou devrions-nous leur proposer de les mettre dans une villa à Dubaï et les filmer H24... 

Vous n’êtes pas un peu dur là ? 

Non on a à peine effleuré le sommet à ce stade, parce que même pris la main dans le sac et la fourchette dans l’assiette clandestine, ils creusent toujours plus profond dans le foutage de gueule et le mépris à l'égard du reste de la population avec les tentatives de justification, entre le pathétique poisson d’avril lancé par l’un et le je ne savais pas que c’était un restaurant clandestin en dépit de toutes les apparences, venant d’un ancien ministre de l’intérieur, plus agent 212 que Sherlock Holmes apparemment.  

Est-ce qu’on imagine une minute la crédibilité que l'individu moyen aurait devant les forces de l’ordre ou un juge avec cette ligne de défense ? Ça ressemble à la mauvaise justification d’une petite frappe arrêtée pour la quinzième fois pour trafic de stupéfiant : quoi, un paquet de cocaïne dans ma boite à gant, je pensais que c’était de la farine pour préparer des crêpes à mes neveux et nièces ou je ne savais pas ce que c’était, jvoulais juste rendre service... Les moralisateurs de plateaux de TV pris le nez dans le bifteck devraient se rappeler cet adage, quand le singe veut monter en haut de l’arbre, il faut qu’il ait les fesses propres... 

Il y a quelque chose de particulièrement énervant, dans le deux poids deux mesures qui s’affiche, quand il est répété à longueur de journée que le fraudeur sans défense déchire le contrat social mais que ce qui est condamnable dans la dénonciation du non-respect de la loi par les élites, c’est la dénonciation du comportement et non le comportement lui-même... 

Je pose ça comme ça, mais les résultats du récent sondage qui confirme le désamour pour la chose publique et la tentation extrémiste des quelques électeurs qui se rendent encore aux urnes n’auraient-ils pas un lien de causalité avec ce genre de comportement : quelque chose qui aurait à voir avec l’exemplarité... ça ressemble à un gros mot, j’en conviens... mais je pose l’hypothèse là, bien en vue sur la table du restaurant qui n’en est pas un... 

Mais allons plus loin, n’y a t-il pas un biais dès le départ avec cette prohibition de l’ouverture des bars et restaurants... Dans les ministères, les quartiers cossus, c’est restaurant tous les jours... on s’invite de maison en maison avec un chef attaché à demeure à la cuisine...  

Avec accent bourgeois : Oui mais les pauvres, ils ont les restaurants du cœur et les soupes populaires, vous voyez le deux poids deux mesures n'est pas là ou le croit, salauds de pauvres !  

Alors oui, les pauvres ont les restaurants du cœur mais amis nantis, non, ils n’y vont pas de gaité de cœur, il n’y a pas d’invitation secrète, on y va quand la faim tiraille de trop et vous seriez déçus du menu, à vrai dire c’est un restaurant Ikea, on vous donne les ingrédients il vous faut les assembler vous-mêmes... vous devriez aller voir, genre rendez-vous en terre inconnue... 

Et ainsi, confrontés à la réalité, plutôt que d’utiliser une vieille technique consistant à livrer quelques lampistes une fois le pot au feu découvert pour ne laisser voir que la partie émergée de la salade Iceberg... vous pourriez utilement lancer une vraie prohibition, celle contre la pauvreté et une profonde résistance à l’idée de se mettre au-dessus des lois... 

08:51 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chronique, humour, gastronomie, restaurants clandestins | |  Facebook | | | |  Imprimer