Pour se projeter, l’Homme a besoin de perspectives, mais pas que ! S’il faut un peu de visibilité et nous en manquons cruellement, l’incertitude pesant sur les psychés, c’est aussi la création de souvenirs collectifs qui depuis un an fait défaut : quelques claps aux fenêtres lors du premier confinement, assister à la fermeture des lieux de culture et de convivialité, assister nombreux, mais chacun dans nos coins aux annonces gouvernementales, se poser la question de ce qui est le plus tendance, le masque tissu ou le masque chirurgical… c’est un peu court et surtout fort peu constructeur d’un vivre ensemble
C’est comme si dans la mémoire collective, à l’échelle de l’expérience du quotidien, un coup de gomme aura été passé sur la vie collective.
Ce point des souvenirs, des expériences est primordial, dans le développement des individus que nous sommes. Les exemples dans la littérature et la fiction télévisée ou cinématographique où les traumatismes liés à l’absence de souvenirs ne permettent pas de grandir et de croitre normalement sont nombreux, jusqu’à la nécessaire implantation de souvenirs dans les intelligences artificielles ou les clones/cyborg pour les rapprocher de la psyché organique : nous sommes la somme de nos expériences et de nos souvenirs, pour s’en inspirer ou s’en extraire !
Ces restrictions, disons-le, ce n’est ni la guerre, ni l’expérience concentrationnaire, il faut raison garder mais la réalité est tenace : le sens de la fête, ce n’est pas que la bamboche, c’est aussi le partage, la construction dans le partage, les bads trips et les moments inoubliables, les concerts décevants et les fous rires jusqu’au bout de la nuit : et si finalement chaque aventure d’Astérix et de son compère n’était que le prétexte pour se remémorer les histoires passées en faisant ripaille ensemble à la fin de chaque album.
Partager une toile, un verre, un repas, un spectacle, un voyage, une exposition, par leurs fonctions de la découverte et de l’échange des activités relèvent du domaine du rite social. Et nous carburons à l’échange et au rite. Le don et le contre don, je paie ma tournée, tu paies la tienne.
C’est donc là que réside l’urgence de retrouver au plus vite ces pans de la vie sociale.
Et il est intéressant au passage de se rendre compte que ce que vivent des millions de personnes, l’isolement au quotidien, nous l’avons tous expérimenté : il faudra s’en rappeler pour ne pas laisser à l’isolement social toutes ces personnes une fois les restrictions levées. La culture et le partage sont plus que jamais des services publics. La bamboche pour faire du lien social, voilà une mesure que le monde d’après ferait bien de mettre au programme !