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algues vertes

  • Arrêtons de faire prendre des vessies pour des lanternes...

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    En politique, faire prendre des vessies pour des lanternes est un art que certains personnages maîtrisent avec plus ou moins de brio. Ces derniers temps, les sujets ne manquent pas, il n’est qu’à voir la crise financière et les algues vertes. Quel rapport me direz-vous si ce n’est que le chroniqueur est finistérien et ne peut s’empêcher de remettre sur le tapis un sujet breton ?

    Justement, dans les deux cas, c’est bien la responsabilité des fauteurs des troubles que Nicolas Sarkozy et ses copains tentent de faire oublier, et mieux, plutôt que de chercher à résoudre les crises en s’attaquant aux causes, ce sont les conséquences qui sont dans le viseur.

    Dans le cas de la crise financière, qui est devenue une crise tout court, depuis que la finance a repris du poil qu’elle a tondu sur la bête, la spéculation, le système bancaire, les traders, les hedge funds, les paradis fiscaux et tous ce qui pourraient s’en rapprocher ont conduit au désastre qui n’en finit plus de s’étendre. Le chômage gonfle, les croissances sont si molles qu’elles flirtent avec la récession, la paupérisation s’accentue mais l’endettement des Etats, qui a sauvé la clique financière et permis de ne pas se faire le remake de la crise de 29, est maintenant attaqué par tout ce que la finance compte de prédateurs. Pour spéculer, à grande échelle, aucun risque ne doit être pris à la différence du petit boursicoteur qui peut bien perdre ses maigres économies en un clic. Dédouanés et retrouvant avec allégresse et une certaine euphorie des profits et des bonus éhontés, le système financier rallume la mèche que les pompiers de service ont eu toutes les peines du monde à circonscrire.

    Et que font les dits pompiers de service, qui n’ont exigé que de maigres garanties du type « gentlemen agreement » pour toute contrepartie du sauvetage : ils mettent le doigt sur la couture et se mettent au garde à vous des salles de marchés et des agences de notation. Alors que les grands de ce monde pourraient se mettre autour d’une table et les mettre au pas en rappelant que toute spéculation comporte le risque de perdre sa mise, comme au casino, la grande saignée va être pratiquée. Tailler dans les dépenses publiques pour mieux rembourser une dette dont le véritable débiteur est aujourd’hui exonéré. Mais par une perversion manifeste, c’est en stigmatisant les populations qui n’avaient rien demandé de tel que l’opération est réalisée. Les braves individus sauvant par leurs impôts le Léviathan libéral sont devenus par la force du discours de vilaines cigales qu’il est temps de remettre à la frugalité.

    Les agences de notation s’amusent comme des petites folles : elles qui n’avaient pas osé mettre des notes désastreuses sur les banques avec leurs actifs pourris tirent à vue sur les comptes des Etats. Il n’y a pas de morale, mais y en a-t-il eu seulement un jour.

    Deuxième exemple d’un travail de sape de la réalité, il s’agit des algues vertes. Dix huit sangliers sont retrouvés morts sur une plage et les autorités de l’Etat tentent de jouer la montre pour ne pas à avoir à traiter l’odieuse vérité : les algues tuent, et elles sont le produit d’une politique agricole désastreuse en Bretagne. Au mieux, l’Etat débloquera quelques fonds pour nettoyer ces algues, histoire de ne pas trop importuner l’autochtone et le touriste tout en préservant de la colère le représentant de cette agriculture intensive et productiviste lors du prochain dîner.

    Rappel des faits, les rejets des porcheries et autres étables à animaux, tout comme la dispersion d’engrais à outrance dans les champs saturent les sols de nitrates, qui se retrouvent dans les nappes, cours d’eau et pour finir en mer. L’eau n’est plus potable, les cours d’eau sont pollués et provoquent l’apparition d’algues que ce concentré de nitrates booste encore mieux qu’un coureur du tour de France après une prise d’EPO. Tout est scientifiquement prouvé sans qu’aucune contestation sérieuse ne vienne remettre en cause tout cela (à l’exception des lobbys agricoles qui s’agitent par une communication tout azimut). Tout le monde connaît la solution : passer sur un modèle agricole plus soutenable, utilisant moins d’intrant azoté, en réglementant et limitant réellement l’élevage intensif des porcs, vaches et autres animaux d’élevage. Pour cela, une transition et un accompagnement de toutes les filières sont nécessaires, même les « intégristes » écolo que stigmatise Nicolas Sarkozy le savent.

    Pourtant rien n’avance réellement, et la dernière prise de parole du président de la République en Presqu’île de Crozon avait même tout du plaidoyer de l’avocat qui défend l’accusation. Tout au plus, l’Etat donnera l’aumône en envoyant deux ou trois tracteurs pour nettoyer les plages.

    En étant outrancier, le politique cherche à déplacer le problème pour ne pas avoir à s’y frotter. La culpabilité est renversée dans une diatribe périlleuse, ce n’est plus le modèle agricole mais la population qui ne sait pas apprécier une eau polluée et des plages mortelles ! Cette même population devra passer à la caisse pour dépolluer les sols et les eaux, et en silence s’il vous plaît…

    Si cela venait à se passer du côté du Cap Nègre et du fort de Brégançon, il n’est pas sur que Nicolas Sarkozy tienne le même discours, allez savoir pourquoi ?...

    Pourtant, cette art de faire passer des vessies pour des lanternes connaît une certaine limite lorsque le niveau d’exaspération, autrement appelé, seuil du « foutage de gueule » est atteint. Quand va t'on franchir ce fameux seuil, si ce n'est déjà le cas…