Il est des matins où le café passe moins bien au petit déjeuner, des matins où l’on manque de s’étrangler avec sa tartine, des matins où l’on se pince pour savoir si l’on est réveillé en lisant la presse. L’illusion de la normalité du monde s’évanouit aussi surement que le sucre au fond de la tasse. Massacres interminables en Syrie, révolutions arabes qui n’en finissent plus de baigner dans le sang, infanticide, ou plus légèrement, un homme de 610 kg que le roi d’Arabie Saoudite oblige à se faire soigner … le péquin moyen ne s’y retrouve pas, et n’est pas même rassuré de ne pas se retrouver dans la rubrique des freaks de l’actualité.
Et puis c’est le choc, terrible, total, inimaginable. Un australien de 70 ans a été opéré d’urgence pour se faire enlever une fourchette introduite dans l’urètre. Oui vous avez bien lu, le manche d’une fourchette dans l’urètre, le canal pour faire pipi… Et le septuagénaire se l’est enfoncé sciemment, avec délice même… La sodurètre que ça s’appelle, mot valise que tout un chacun aura compris et qui fait froid dans le dos, en dépit d’une parité respectée dans la pratique… Là où le pire cauchemar d’une majorité d’individus serait de se retrouver esclave d’une sonde urinaire, quelques-uns se complaisent à y introduire quelque objet pour, paraît-il, se procurer des sensations toujours plus fortes. A la lecture de cette dépêche, un sentiment de malaise a parcouru le chroniqueur, un frisson désagréable, que seule provoque la vision de la chose pratiquée sur sa personne. La souffrance par procuration et imagination, ça existe…
La journée ne pourra pas être comme les autres. Les questions vont fuser, chaque heure. C’est quoi être normal ? la normalité c’est par où ? Et puis comment on en arrive là. Comment fait-on pour basculer ? Comment la violence, la douleur, le mal-être, la folie, la déviance s’insinuent en tout un chacun. Comment peut on risquer de se blesser, de se mutiler pour quelques supposés plaisirs orgasmiques ?
Le soir, le cerveau épuisé, l’estomac nauséeux, le sommeil qui ne veut pas venir, sans plus de réponse, on se remémore la chanson de Stephan Eicher, déjeuner en paix.
C’est dit, demain, pas de journal avec le café-tartine. Il sera toujours de temps de se faire rattraper par la réalité…