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De la banalité du panurgisme et autres considérations ovinesques…

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humour, chronique, mouton, panurgisme, sociologie, mass média, orwellNe vous est-il jamais arrivé, après une discussion entre amis, de ressortir gonflé à bloc, convaincu d’être du bon côté et dans le vrai à propos de votre système de pensée. Cela fait un bien fou non ?

A contrario, il n’est pas rare que vous vous sentiez mal à l’aise au gré d’une conversation sans pour autant montrer votre désaccord, de peur de vous sentir exclu d’un groupe.

Tout va bien, vous êtes banalement et terriblement humain. Vous êtes comme l’immense majorité de la population un mouton de panurge !

Sans cette banalité de l’esprit moutonnier, réel ou camouflé, l’humanité ne serait capable ni du meilleur, ni du pire ! 

Seuls les bretteurs de haut vol se complaisent dans le débat contradictoire, sans s’écouter, ou juste assez pour rebondir sur le propos de l’autre pour mieux se mettre en valeur. L’immense majorité du genre humain n’aime pas le conflit direct, en face à face, et préférera le conflit larvé, hypocrite, celui de la manipulation de derrière la scène. Et si possible en groupe, l’instinct grégaire étant inscrit dans le comportement d’Homo Sapiens. C’est moche, j’en conviens…

Cette force qu’est la conviction de groupe n’a pas besoin de vérité pour s’alimenter… tentez une expérience singulière : créez une rumeur de toute pièce, diffusez là par différents canaux auprès de vos amis ou connaissances, laissez murir, puis après un certain temps, mettez le sujet sur le tapis. La rumeur s’est transformée en une vérité pour les uns et les autres du seul fait qu’elle est partagée. Vieille technique de communication, la construction de l’opinion du plus grand nombre se fait par la création d’une évidence qui ne l’est pas de prime abord. Ce qui tend à prouver qu’on ne naît pas mouton mais qu’on le devient…

Mais comment lutter et après tout  faut-il lutter contre ce phénomène : double bonne question qui ne m’étonne pas, m’étant fait par moi-même une opinion sur la pertinence de ce propos, je ne peux qu’être d’accord avec ma pomme !

Le Panurgisme a les qualités de ses défauts et inversement, ce qui ne veut rien dire mais avec cette assertion je viens apporter ma pierre (très modeste, à peine perceptible) à l’édifice de la construction  de l’opinion et de la pensée humaine!

Un point que personne ne contestera : le Panurgisme est agréable pour celui qui le pratique. Réfléchir, penser, remettre en question, peser le pour et le contre n’est pas toujours confortable et peut se révéler extrêmement fatiguant. S’insérer dans un groupe, dans une pensée, c’est comme se glisser dans une couverture moelleuse, soyeuse, la chaleur entourant rapidement le corps et l’esprit. Le fond de la pensée est préexistant, et n’est-il pas doux d’être d’accord avec ses congénères sans se poser trop de question ? Le raisonnement est un luxe que la pauvreté et la procrastination empêchent parfois de mettre en œuvre, les préoccupations à court terme l’emportant sur le reste, à juste titre.

De ce point de vue, les techniques pour amener le mouton à suivre le troupeau ont évolué à travers les âges, elles se sont sophistiquées, parfois camouflées…

humour, chronique, mouton, panurgisme, sociologie, mass média, orwellL’opium du peuple a ainsi changé de composition, de la religion il a évolué dans différents canaux, les médias étant la nouvelle chaire de diffusion de l’information. Le mouton a son journal préféré (mais il lit de moins en moins), sa chaine de télévision préférée (en revanche il en fait des overdoses) et voit d’un œil suspect qu’on puisse aller voir ailleurs si les réflexions sont différentes sous peine de crime de lèse-pensée.

La caricature est le principe, la pondération l’exception. C’est sur ce terreau que l’opinion est construite. Il suffit de balancer un argument, de le répéter, comme une musique douce, pour qu’il devienne vérité d’évangile pratiquement impossible à déloger de l’esprit du mouton qui ne prend pas la peine de vérifier l’exactitude ou non de l’information. 

C’est une bataille culturelle à l’œuvre, où les uns et les autres se confrontent en rangs serrés, chacun comptant ses moutons respectifs.

Ajoutons que c’est principalement la passivité du mouton qui est recherchée, pas sa participation. Le mouton est une majorité silencieuse bien pratique dont les uns et les autres se prévalent… on lui fait dire beaucoup de choses au mouton, il raisonne comme Monsieur Jourdain, sans s’en rendre compte.

 Le mouton proteste rarement sauf s’il est pris dans un mouvement de foule, le plus souvent à l’insu de son plein gré. Mais une fois engagé, il est enragé, car il suit son leader aveuglément, sans trop réfléchir.

Il arrive que le mouton se réveille à l’occasion et qu’il exige sa juste place, sa juste représentation, sa juste rétribution. Tout l’art dans ce cas est de faire croire au mouton qu’il a obtenu une satisfaction apparente à ses revendications en lui donnant un hochet dont il pourra se prévaloir. Mais il faut le faire habilement, le rendormir sans que la manœuvre ne soit trop visible parce qu’il est méfiant dans ces états de semi-conscience au monde.

Le panurgisme comme instrument de réussite individuelle.

Il peut être utile de passer pour un mouton pour réussir. L’originalité, la grande gueule ne sont pas toujours des caractéristiques qui servent les intérêts de son propriétaire. Il faut savoir faire allégeance à la loi du plus grand nombre mais surtout à la loi de ceux qui tiennent le manche. La marge de manœuvre peut être délicate. Il faut être suiviste quand il est nécessaire de l’être, s’engouffrer dans la brèche individuelle à la bonne occasion. Autrement dit, il faut sentir le sens du vent, que l’on nomme opportunisme si l’on est insultant, clairvoyance en étant diplomate. Nous sommes dans ce cas en présence d’un faux mouton, une sorte de loup dans la bergerie qui aurait emprunté un costume d’ovidé, en attendant son heure.

Il arrive, rarement, que le loup soit confondu. Et que les autres moutons lui fassent la peau. Mais c’est l’exception qui confirme la règle. Après tout, il y a des abrutis partout et les loups n’échappent pas au phénomène. Le mouton pourra être habilement manipulé pour se sentir obligé d’exprimer sa colère et à passer sa rage sur le bouc émissaire. Décidément on ne sort pas de l’ordre des caprins dans le panurgisme…

Le panurgisme est une nécessité parfois, une attitude souvent. Ne pas faire de vague peut être un moyen de sauver sa peau, mais elle n’empêche pas de se faire tondre, comme tout bon mouton qui se respecte. Le panurgisme peut conduire le mouton à sa propre perte s’il n’y prête pas suffisamment attention. Une véritable boucherie, digne d’un abattoir de voir ces pauvres bêtes la tête sur le billot sans protester ou si peu.

Le mouton peut-il se retourner contre son berger ?

Les cas de retournement de situation sont rares, par définition le mouton suit le berger. La ferme des animaux d’Orwell en fait l’animal le plus suiviste et stupide de l’histoire. Pourtant, lorsque le mouton se réveille, il le fait en groupe, attaquant alors le berger, et tout ce qu’il y a autour. La vengeance du mouton est terrible, il s’y épuise, ne sachant pas s’arrêter à temps. C’est ce que l’on appelle pudiquement le balancier de l’Histoire.

humour, chronique, mouton, panurgisme, sociologie, mass média, orwellAlors des solutions ?

Il faut éduquer le mouton pour qu’il oublie sa condition d’ovin. La fin du panurgisme est à ce prix. Apprendre le sens critique, la construction d’un raisonnement c’est faire œuvre utile pour extirper ce mal qu’est le panurgisme. C’est permettre l’émancipation du mouton pour ne pas que se réalise le dernier commandement qui reste en définitive dans la ferme des animaux : Tous les animaux sont égaux, mais certains le sont plus que d'autres

Moutons de tous les pays, unissez-vous !

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