Une très belle chronique de François Morel, entre les deux tours, sur les convictions de son papa...
Papa par
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Une très belle chronique de François Morel, entre les deux tours, sur les convictions de son papa...
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Le 1er tour approche à grand pas et le grand exercice de culpabilisation de l’électeur qui n’aurait pas fait le choix d’un vote en faveur d’un des deux principaux challengers atteint son paroxysme.
La une de Libération du jour ne trompe pas : en faisant de Marine Le Pen la menace qui pèse sur ce scrutin, le quotidien entend rappeler au peuple de gauche le spectre du 21 avril 2002. Le vote dit utile est de retour, il va constituer l’argument principal d’une stratégie politique de fin de campagne.
D’accord, le programme d’Eva Joly est celui qui s’approche le plus de ce qu’il conviendrait de faire à l’heure du changement climatique, ok Méluche a une stature et un discours qui rappellent les grandes heures de la gauche, un Jaurès du 21ème siècle, et c’est vrai, Hollande, dans sa recherche de posture mitterrandienne, avec un programme en 60 points qui ne donne pas la clé de la société proposée, si ce n’est quelques touches de ci de là, n’est pas du genre à transporter celui qui pense qu’un autre monde est possible. Mais vous êtes responsable, vous ne voulez pas faire perdre votre camp, la gauche, n’est-ce pas? Alors votez utile !
Notons que certains socialistes, en off, vous diront qu’ils vous comprennent et que si ça ne tenait qu’à eux, ils voteraient pour un autre candidat que le leur mais vous savez ce que c’est, on ne fait pas toujours ce que l’on veut dans la vie…
A l’heure de glisser un bulletin dans l’enveloppe, puis dans l’urne, l’électeur devra dépasser la culpabilité que tentent de lui faire endosser les uns et les autres. C’est un acte difficile, la pression du groupe est forte, même si le secret de l’isoloir devrait pouvoir permettre de s’en abstraire.
Car c’est bien la conscience qui doit guider le vote. Voter utile peut être un acte pensé, réfléchi, assumé. Mais ce n’est pas une fin en soi. Ce peut même être une mauvaise raison, si on le fait en traînant les pieds.
Si un candidat a peur de ne pas figurer au second tour, il ne doit pas en chercher la faute chez les autres, mais plutôt dans son incapacité à convaincre. C’est la leçon de 2002, Lionel Jospin, en dépit d’un bon bilan comme premier ministre n’a pas su faire une bon candidat (rappelez vous l'annonce de sa candidature par fax...).
Si François Hollande considère avoir réalisé une bonne campagne, il ne peut qu’être à son honneur, et celui de ses partisans, de ne pas dégainer l’argument du vote utile. Après tout, le premier tour permet de saisir l’état de l’opinion, de construire un programme politique en faisant la synthèse au deuxième tour. Et on peut faire confiance au candidat du PS pour la réaliser, il en est le spécialiste. Mais encore faut-il laisser le citoyen s’exprimer en paix. Ça s’appelle le respect. Ou autrement dit, ne pas prendre l’électeur pour un con…
La présidentielle a le charme des événements qui suspendent le temps et abolissent la réalité. Les candidats, avec plus ou moins de talents, avec plus ou moins d’honnêteté, présentent le projet qu’ils défendent et qu’ils entendent mettre en œuvre une fois élue, pendant que les supporters se prennent à rêver d’un avenir radieux qui ne peut qu’être différent du présent qu’ils vivent au quotidien.
Une campagne présidentielle est hors du temps, le principe de réalité s’effaçant derrière la rhétorique, l’esprit de groupe et la constitution d’une mythologie propre à chacun.
Le candidat, investit des pouvoirs d’un roi thaumaturge exalte la foi de ses sympathisants par une chanson de geste qui dure quelques mois, labourant les terres nationales à la rencontre de ce que les commentateurs appellent les forces vives de la nation, profitant d’une salle des fêtes, d’un centre des congrès, d’un zénith ou encore d’une place publique pour se faire tribun des grands comme des petits jours. Et là, emporté par la foule, le sympathisant se sent poussé des ailes, à cœur vaillant, rien d’impossible, la révolution est là mes frères, à quelques bulletins de vote glissés dans une urne. Dans une atmosphère de kermesse, le public scande le nom de son champion, cette fois, c’est la bonne, tout va changer pour le mieux.