Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Defense de rire - Page 20

  • Nul n’est prophète en son pays…

    Imprimer

    piketty, capital, keynes, alternatives économiques, fiscalitéC’est ce que Thomas Piketty peut vérifier chaque jour. L’économiste, récent auteur d’un capital au XXIème qui fait un tabac aux Etats-Unis, est invité par les grands de ce monde pour échanger sur sa thèse pendant qu’en France, à l’exception de quelques cénacles pas forcément proches des partis de gouvernement, la seule question économique qui intéresse est l'impact du forfait de Franck Ribéry sur le parcours de l’équipe de France.

    Déjà, la thèse de pour une révolution fiscale, qui proposait la fusion de l’impôt sur le revenu et la CSG, pour élargir à tous les revenus la progressivité refondée de l’impôt, avait été rapidement écartée par celui qui allait devenir Président en se prononçant dans des envolées lyriques mémorables contre le mur de la finance : depuis celui-ci en est devenu un des maçons les plus dévoués et efficaces.

    Pour sa part, Thomas Piketty est de ces, trop rares?, économistes qui partent de l’analyse de la société, en multipliant les incursions dans des matières diversifiées, sans faire des équations mathématiques l’alpha et l’oméga de la démonstration économique : ce que lui reproche de nombreux confrères dont les équations n’ont pourtant souvent montré aucune réalité si ce n’est la vacuité et le caractère hors sol de l’analyse.

    Dans le capital au XXIème siècle, Piketty analyse la répartition et l’accumulation des richesses, au travers du patrimoine et des revenus, quel qu’en soit l’origine, en Europe et aux Etats-Unis, depuis le XIXème siècle. Et le constat est sans appel : les inégalités de revenus, après s’être réduites de l’entre-deux guerres à la fin des années 70 repartent de plus belle, se rapprochant dangereusement de ce qu’elles étaient aux alentours de la première guerre mondiale.

    En cause, l’accumulation du patrimoine, les revenus liés à ce dernier et aux activités de la finance, dans un monde de croissance molle, sont en train de mettre un sévère coup de canif au contrat social et à une certaine conception de l’équité. Les très très riches deviennent chaque jour monstrueusement plus riches, les classes moyennes, au contraire, voient le spectre du déclassement se rapprocher. En attendant, la poudrière se reforme, comme la montée du national-populisme en l’Europe le démontre….

    Il rappelle également le fait que l’origine des revenus n’est plus exactement ce qu’elle était avant-hier et hier. Autrefois fondée sur la propriété foncière terrienne, l’origine des revenus s’est déplacée. Le patrimoine, le capital a lui-même évolué. Les modalités d’imposition moins. Ces dernières ont toujours un temps de retard. Et même deux ou trois ces jours-ci. Depuis les années 70, les cadeaux fiscaux se ramassent à la pelle, et les impôts, de progressifs sont même devenus dégressifs en terme absolu. Concourant à l’explosion des inégalités de patrimoine…et de revenus.

    Pour répondre à cet état de fait, Piketty propose l’instauration d’une fiscalité mondiale progressive sur le patrimoine. Pour permettre de réduire les inégalités, limiter les effets de constitution astronomique de patrimoine et trouver les sources de financement nécessaires à la réalisation du contrat social. Sachant qu’il n’a pas renié ses écrits précédents sur la fusion impôt sur le revenu CSG…

    Sans aller jusqu'à euthanasier le rentier comme le proposait Keynes, Piketty souhaite le ramener à une place moins centrale au travers de la fiscalité.

    Et oui, la fiscalité a souvent été l’instrument par lequel la révolution est arrivée, l’iniquité et l’inadaptation  d’un système fiscal le symbole d’une crise, n’en déplaise aux libéraux de tous poils.

     

    Dans une interview à Alternatives Economiques, à la question du caractère utopique de sa proposition, il répond avec beaucoup de malice que les utopies sont utiles. Elles sont toujours le préalable à une discussion et à l’évolution de la société. Après tout, l’impôt sur le revenu était une des utopies du XIXème siècle réalisée au début du XXème siècle. Et en ce début de XXIème, où les problèmes à résoudre sont multiples et complexes, nous en manquons cruellement d’utopies. Il serait temps de ré-enchanter la politique… Et les thèses de Piketty peuvent y contribuer…

  • Quand le sage montre le brésil, l'imbécile ne voit que la balle...

    Imprimer

    bresil, foot, bygmalion, FN, enfumage, panemComme le dit l’adage qui n’en est pas un, une petite Samba, et ça repart. Une bonne coupe du monde de football va permettre à l’élite de souffler un peu. Après tout, elle a aussi droit à des vacances, le commun des mortels n’imagine pas ce que c’est de dilapider la richesse commune, courir après un profit qui se fait plus rare, tenter de gagner une élection, tenter d’expliquer pourquoi on l’a perdu, gérer l’aléa démocratique. Bref, il était temps que les regards se tournent vers le Brésil, en prenant bien soin de cacher les problèmes sociaux qui y font l’actualité pour ne pas gâcher la magie de la fête.

    Des plans sociaux, de la paupérisation croissante de la société, du score du FN et de son racisme décomplexé, de l’affaire bygmalion, de l’aveuglement du président de la République vous n’entendrez presque plus parler. Au demeurant, les questions de vie et de mort qui occuperont le quidam seront de savoir si Franck Ribery peut jouer, s’il pourra assurer autant sur les terrains que dans les back-room carioca et si la France ira aussi loin que les élites le souhaitent. Gagne t’elle la coupe du monde que le PIB sera relevé de 0,2 % et la natalité explosera dans 9 mois. Au pire, les bleus se comporteront comme des petits cons à la sauce Knysna et la vindicte populaire se projettera contre ces footballeurs en herbe trop tôt gavés à l’économie de marché, oubliant au passage tout le reste qui serait autrement bien plus à réprimander…

    Rolland Garros, coupe du monde de foot, tour de France, rediffusion des films de Max Pécas : un couloir de trois mois de repos pour revenir plus en forme que jamais dans la superficialité et la médiocrité de la rentrée : être une élite, c’est un métier… et se faire enfumer un sacerdoce…

     

    A moins qu’une bonne coupure d’électricité… Mais ça c’est une autre histoire…

  • Au pied de la lettre

    Imprimer

    Les chiffres sont magiques. Depuis toujours. Il y a quelque chose d’ésotérique derrière ces suites numériques. Comme si les chiffres permettaient d’expliquer le monde par un caractère incontestable. Le nombre d’or, pi… Ça vous objective le débat d’y aller de son petit chiffre. Un chiffre, c’est un chiffre ma bonne dame.

    C’est pas faux. Mais un chiffre, c’est surtout ce que l’on en fait, comment on l’a fabriqué et là, c’est un allié précieux pour lui faire dire tout et son contraire. Les exemples foisonnent de ces prises d’otages répétées sur des chiffres sans fondement, seulement pour « objectiver » un raisonnement.

    Pourtant, une petite analyse sérieuse, quelques questions à peine impertinentes permettraient de lever la supercherie. Mais il faut croire que seule la taille des prothèses mammaires de Nabila intéresse le journalisme d’investigation. Ce qui n’est pas totalement vrai, rendons à César ce qui lui appartient, certaines rubriques désintox existent. Mais le spectateur est plus subjugué par les « lolcats », ça c’est un pilier de la société moderne, pas cette triste réalité que les empêcheurs de réfléchir en rond imposent : le spectateur, il est comme devant un magicien, il sait bien qu’il y a un truc mais il préfère ne pas savoir. Pour continuer à rêver. Ou plus précisément pour ne pas réfléchir.

    Ces derniers temps, la tendance s’amplifie. La commission européenne vient de nous en livrer un exemple. Elle négocie actuellement un traité de libre-échange avec les Etats-Unis. TAFTA que ça s’appelle. Devant la pression qui s’installe, la commission clame que rien n’est fait, les discussions ne permettent pas de donner le contour du résultat final. Mais dans le même temps, elle annonce que ce projet de traité non abouti devrait permettre d’enrichir chaque citoyen européen de 545 € par an. C’est précis comme chiffre pour des négociations bien floues et incertaines.

    Autre légende urbaine : les chinois accaparent les terres africaines. C’est pas faux mais ce ne sont ni les seuls, ni les premiers. Les américains sont n°1, la chine arrive en 6ème position (futuribles de janvier). Comme quoi les chiffres recouvrent des réalités à géométrie variable.

    Question de chiffre, certains y vont fort : quand Michèle Alliot-Marie dit qu’elle va perdre de l’argent, il y a comme un malaise. On parle de quoi ? De près de 11 000 €. Par mois. Comment peut-on vivre avec cela, on se le demande c’est vrai…

    Les exemples pourraient être multipliés à l’infini. Chiffres à l’appui.

    Et question chiffre, la reine c’est la SNCF. Avec elle, tout est possible. Pour quelques centimètres de trop, la vénérable compagnie de transport ferroviaire devient la risée de tout un pays, peut être u monde, ne soyons pas modestes, pour faire plaisir à Arnaud Montebourg. On est pas champion du monde tous les jours. Les quais vont être rabotés, pour faire passer les nouvelles rames, et le attention à la marche en descendant des trains classiques va devenir attention au canyon. Errare humanum est. A ce niveau, c’est inimaginable. Mais quelque part, ça rassure. A quelques centimètres près, la nature humaine reste fidèle à elle-même, imprévisible. Pour le pire mais heureusement pour le meilleur.

     

    Avec ces quelques centimètres de trop et ces quelques millions en plus, avouons-le, la magie a opéré : ça faisait bien longtemps qu’on ne s’était pas autant poilé ! Un rire vaut bien un bon steak en or massif. Il y a des chiffres que l’on peut prendre au pied de la lettre…

  • D'un génocide à l'autre...

    Imprimer

    Kigali il y a 20 ans, Srebrenica, il y a 19 ans. Si loin, si proche. Toujours la même mécanique. Irréelle et pourtant d’une efficacité redoutable, pour faire tomber l’Homme dans ses pires travers. Dénier l’humanité de l’autre, en faire le bouc-émissaire, instiller le virus de la haine et du meurtre dans les têtes. Puis lâcher les chiens. On se dit que c’est loin, que ça ne peut pas arriver par ici. Que ça ne peut plus arriver. Pourtant, sans y prendre garde, la mécanique implacable peut se mettre en place, mieux, les ingrédients sont là pour sa réalisation.

    La montée des populismes en Europe est constante et à chaque élection plus flagrante. Le vote d’adhésion à des idées nauséabondes et dangereuses  progresse, tandis que nombre d’électeurs baissent les bras et ne se déplacent plus pour contrer dans les urnes le fond de l’ère mortifère. L’extrême droite ramasse le gros lot, contamine les discours, les partis traditionnels, les conversations, les postures. L’autre est la cause de tous les problèmes, la petite musique s’infiltre partout, dans les blagues de machine à café, dans les repas de famille, sur les murs facebook, dans les chaines de mail…

    Dans le cas du génocide Rwandais, mais tous les autres exemples comporteraient des ingrédients similaires, il y a la construction artificielle d’une différence. Par définition, le racisme est une construction. Ce narcissisme des petites différences que Freud dénonçait, qui rappelle que la communauté des Hommes préfère parfois distinguer ce qui n’est pas distinguable que de mettre en lumière la part commune de l’humanité. Au Rwanda, il a fallu un siècle pour que le processus arrive à maturité, le poison raciste ayant été introduit par le colonisateur, en distinguant bon noir et mauvais noir, entre hutus et tutsis, le temps a fait le reste. C’est parfois plus long, parfois plus court…

    Le bourrage de crâne, la construction du sentiment de haine et un matin un appel au meurtre qui est entendu. Ça peut aller très vite. Le voisin se transforme en prédateur, l’horreur devient la réalité. Puis le réveil, brutal. La vie ne va pas mieux, au contraire, la mort imprègne les rues, la terre, les immeubles, les vêtements, les corps, les consciences.

    Utiliser un bouc-émissaire, désigner l’autre, c’est une lâcheté et une paresse intellectuelles. C’est le signe de imbécillité. Il n’y a aucun excuse, il n’y a pas à comprendre. Tout au plus, et c’est le principal, à démontrer la stupidité de ces idéologies, la fausse route que prennent ceux qui tombent dans le panneau. Inlassablement, en permanence.

    Srebrenica, Kigali il y a 20 ans. Si loin, si proche. Les commémorations pour les commémorations n’ont pas de valeur. Une cérémonie seule, trop institutionnalisée n’a pas de plus-value. Elle peut même rendre l’événement éthéré, lointain, comme inexistant. Mais se souvenir pour comprendre, se rappeler de la fragilité des situations, du combat permanent que représente la construction d’un vivre ensemble, échanger, discuter, se rendre compte que la préservation de ce vivre ensemble impose des efforts de tous les instants, aucune relâche, c’est un travail d’utilité publique.

     

    N’oublions pas les morts, n’oublions pas comment et pourquoi ils ont été tués. N’oublions pas que nous ne sommes pas différents de ceux qui sont tombés et de ceux qui ont tués. Pour ne pas finir dans l’une de ces deux catégories, rappelons-nous Kigali, rappelons-nous Srebrenica…

  • Société jetable

    Imprimer

    stylo jetable, bic, porte plume, barbeIl y a des objets qui résument toutes les problématiques d’une époque, et si le smartphone et autres tablettes pourraient prétendre à ce titre, le stylo jetable est peut être encore plus surement le grand gagnant. C’est un objet de tous les jours, presque insignifiant tant il fait partie de notre quotidien. Son aïeul, le porte-plume, n’était pas aussi pratique, convenons-en : il fallait se déplacer avec la plume, le prolongement qui le porte, l’encrier et le papier buvard. L’encrier nécessitait d’être rechargé, son encre tachait, la bille qui évite les gros pâtés n’était pas encore inventé. Sa durée de vie, comparée à celle du stylo jetable représente presque l’éternité. Le porte-plume a encore ses amateurs, calligraphes amateurs et professionnels, mais c’est pratiquement une caste ésotérique. 

    Lire la suite