Risque zéro, principe pour gogo. Dans sa farouche croyance qu’il peut tout maîtriser, Homo sapiens se retrouve toujours démuni quand la nature reprend ses droits. La Bretagne le vit avec les tempêtes et les inondations de ces jours ci. Construire en bord de mer, vivre en zone inondable, c’est un pari que certains oublient avoir pris quand le risque se réalise. Sur l’instant, la détresse peut être compréhensible. Mais la responsabilité n’en reste pas moins là. La tempête ou la rivière en crue n’ont rien fait de plus que ce que font les tempêtes et les rivières en crue en pareil cas : elles défoncent, elles inondent. Et ce n’est pas la volonté ou un décret qui changeront la chose.
Defense de rire - Page 21
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Fluctuat Nec Mergitur
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Arrivederci Cavanna
Il y a des hommes et des femmes dans la vie qui changent une personne. Chaque interaction transforme un peu ce que l’on est. Je n’ai jamais rencontré personnellement François Cavanna, mais cet homme, son œuvre, sa vie m’ont marqué.
Vers 14, 15 ans, j’ai découvert les ritals, et le singe devint con… Une claque monumentale. L’écriture pouvait être belle sans être pédante, drôle pour mieux faire passer le fond du discours, la langue pouvait être tordue pour la rendre agréablement novatrice, un écrivain pouvait raconter une histoire en interpellant le lecteur, on pouvait ne pas faire lettres classiques et parler aux gens avec intelligence. Plus tard, avec Saramago, Céline, Echnoz dans des styles différents, je prendrais à nouveau un gros coup de poing littéraire.
Cavanna, c’était un personnage, une vie. Un monolithe avec ses énormes bacchantes, son franc-parler et cet air d’ours mal léché. Un aventurier avec Hara-Kiri et Charlie. Un novateur. Et un homme avec ses faiblesses, sa tendresse, un être cabossé par la vie. Avec ses contradictions. Qui le rendait si proche…
Ses derniers billets dans Charlie annonçait la triste nouvelle à venir, la salope de maladie prenait toujours plus de place, et elle avait fait alliance avec l’usure du corps d’une existence bien remplie.
Il fait partie de ces personnages qui ont eu tellement de vies qu’ils ne sont pas totalement humains.
De sa jeunesse de fils de rital et de morvandiou, le STO, sa Russkoff, le retour à Paris, Maria et le lancement dans la vie professionnelle comme dessinateur, puis le basculement, heureux, dans l’écriture… les hauts, les bas, la vie, les morts…
On est admiratif devant ce parcours, d’autant plus que Cavanna était humain, comme vous, comme moi. Ses hésitations, ses dépits, ses faiblesses. Il ne s’en cachait pas mais n’en faisait pas non plus un fonds de commerce comme on le voit si souvent de nos jours.
J’ai et je continue à prendre mon pied en vous lisant cher Cavanna. Votre œuvre, je l’espère drainera encore longtemps le plaisir des gourmets de belles phrases et de grandes histoires. De ceux qui ne se satisfont pas de la connerie humaine, qui la combattent même si elle est épuisante et qu'au fond, le pessimisme est de mise. Pourtant, il y a toujours une lueur. Le singe devint con mais il lui arrive d'être bon.
Merci François Cavanna. C’est en vous lisant que j’ai pris assez de confiance en moi pour me dire que j’aimais lire, que j’aimais écrire, que dans la vie, rien n’est jamais déterminé. Il faut croire en soi, faire fi des conventions et aller de l’avant. Un petit rital de Nogent n’a pas de destin tout tracé pas plus qu'un fils de portugaise.
L’équipe de Hara-Kiri se reconstitue petit à petit la haut et les anges doivent bien se marrer !
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j'aime la galette....
Ce qui doit arriver arrive toujours, et le chroniqueur doit s’y résoudre, il va livrer un billet de vieux sur le mode c’était mieux avant. Mais pas sur n’importe quel sujet ! Un sujet capital de nos sociétés modernes, au carrefour des règles de savoir-vivre et des choix de société. A savoir, le contenu de la galette des rois, et pour être plus précis,- tout en levant un peu le suspense qui tient en haleine le lecteur depuis trois phrases, ce qui, de nos jours, représente une éternité- le déclin inexorable, honteux, de la frangipane, plus particulièrement cette année où elle a quasiment disparu des étalages.
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(Carte de) Voeux
La carte de vœux vit avec son temps, et de papier, elle est devenue électronique. Le progrès qui permet l’envoi massif, prévient la crampe du poignet et désincarne le message. Plus besoin de personnaliser le message, à l’ère du mainstream et du copié-caché-carbone, il suffit de balancer à son listing de mail le mot ou la carte électronique. Au final, une opération de spam de grande envergure basée sur les meilleures intentions du monde.
La loi d’airain de l’économie s’applique aussi aux cartes de vœux, tout ce qui est abondant se déprécie. C’est triste. Même les vœux n’ont plus de valeur, ou si peu. Et ça, le quidam l’a compris : la carte papier se maintient et mieux, elle progresse. L’humanité n’est pas totalement perdue, le sursaut est possible, la carte de vœux tendrait à la prouver. Ou pas. Il y a plus surement la recherche d’une authenticité et d’une attente de réciprocité : n’y a-t-il pas plus de joie à recevoir une lettre par la poste que d’entendre la sonnerie de son smartphone signalant l’arrivée d’un nouveau mail ?
Mais le drame survient inévitablement : sevré d’écriture manuelle à force de ne taper que sur un clavier, avec correcteur orthographique, Homo Sapiens se trouva fort dépourvu quand l’instant fatidique fut venu. Comment tenir le stylo, comment ne pas écrire comme un chacal, dans un style que même un médecin réprouverait, profession dont la spécificité conférait un prestige inégalée, des ordonnances illisibles, que seuls des pharmaciens savaient déchiffrer après cinq ou sept ans de longues études. Mais voilà, tout se perd, l’ordonnance elle-même est devenue électronique, et le métier de pharmacien est contesté, le patient, armé de l’argumentaire des forums (à la maîtrise du français douteuse), se fait inquisiteur et soumet à la question aussi bien le médecin que l’herboriste, maintenant qu’il peut lire l’ordonnance tout seul.
Bref, plus grand monde ne sait tenir un stylo et s’en servir, les américains, précurseurs comme toujours, étant prêts à abandonner l’écriture cursive, si ce n’est pas le signe de la fin des haricots ça, je ne sais pas ce qu’il vous faut de plus.
Tout ça pour dire, au final, que pour la nouvelle année, à défaut d’une carte de vœux, une chronique pour vous souhaiter 365 jours de santé, de bonheur, de plaisir littéraire et de réalisation de vos envies !
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L'enfer, ce n'est pas l'autre...
Le narcissisme des petites différences comme disait Freud est en train de prendre le pas sur le reste. C’est triste. Et c’est grave. La mémoire, et sa fonction sélective plus particulièrement, font oublier à Homo Sapiens qu’à chaque fois qu’il a voulu jouer l’autre contre lui-même, il a fini par se perdre lui aussi et il n’a réussi qu’à progresser qu’en la jouant collectif. Le glissement n’est pas nouveau mais le pourrissement s’accélère. Triste temps que celui où une ministre de la justice se fait accueillir par une petite fille qui lui lance une banane, où le pauvre est suspect par nature et le Rom se voit attribuer le rôle du voleur de poule par atavisme.